Le studio Ghibli

Ce 3 aout 2014 résonnera dans la mémoire des amoureux

du 7eme art comme la fin d'une époque.

Le Studio Ghibli arrête la production de films d'animation.

"Omoide No Marnie", sorti le 19 juillet dernier au Japon,

sera donc le dernier film du studio sur grand écran.

Crée en 1985 par Hayao Miyazaki et Isao Takahata,

le Studio Ghibli est devenu mondialement célèbre au fil des années,

sans rien perdre de sa créativité ni de son indépendance.

Plutôt artisanale à ses débuts, l’entreprise est devenue

en quelques années l’un des plus hauts étendards

de la culture japonaise dans le monde.

2001 : Le Voyage de Chihiro

Miyazaki annonçait à la sortie de son onzième film

"Le vent se lève",

sa décision de mettre fin à sa carrière de réalisateur.

Il n’aura fallu que quelques mois pour que dans la foulé,

le studio mette fin à la production de longs métrages d’animation.

Menacé par les coûts de production élevés de ses films,

encore intégralement réalisés "à la main" au japon,

le Studio Ghibli recentre ses activités sur la réalisation de clips vidéo

et de publicités.

1997 : Princesse Mononoké

C'est en imaginant que l'on ne verra plus sur le grand écran

de film comme "La princesse Mononoke"

ou "Le voyage de Chihiro" que l'on se rend compte de la perte

que représente pour le 7eme art,

et pas uniquement pour le cinéma d'animation,

l'arrêt des activités du Studio Ghibli.

ce Studio avait une vision unique sur le monde,

un point de vue, un engagement...

1988 : Mon voisin Totoro

La Poésie

Jamais dans l’histoire de l’animation, la poésie n’a été aussi présente

à l’écran que dans les productions du Studio Ghibli,

débordant du cadre, s’évadant à coups d’envolées lyriques

où le dessin en 2D, toujours délicat, fait éclater les cœurs d’adulte

pour les renvoyer aux émotions de l’enfance,

toujours avec finesse et subtilité.

Ce cinéma s’adresse plus aux souvenirs inconscients

qu’à nos cerveaux, plus à l’immatérielle âme

qu’à notre esprit cartésien.

1989 : Kiki la petite sorcière

Les Héroïnes

La figure de l’enfant, de la petite fille surtout

(Sheeta, Taeko, Chihiro, Mononoké, Kiki, Ponyo, Arrietty…)

est au cœur du processus créatif.

C’est peut-être pour cette raison que ce cinéma est aussi émouvant

car il est porté par de jeunes héroïnes qui luttent pour que l’enfance

ne se taise jamais, pour qu’elle continue à vivre en nous,

pour l'âme d'adulte redevienne un peu plus humaine.

Tous les films du Studio Ghibli s’adressent conjointement

autant aux enfants qu’aux adultes pour tenter,

sans doute, de réaliser l’hypothétique lien entre les deux.

Réconcilier l’adulte avec l’enfant et apaiser ce dernier.

1994 : Pompoko

La Nature

Chez Ghibli, la nature reprend ses droits,

car le Studio convoque les éléments avec une grâce inouïe,

chaque personnages n'existe que par sa confrontation

à l'air, à l'eau, à la terre ou au feu.

Le Château dans le ciel, Princesse Mononoké, ou Pompoko

sont de véritables manifestes écologiques à la recherche

d’une harmonie entre l’homme et sa planète.

Ghibli est porté par ce souci d’interdépendance entre l’homme

et son environnement, la nature vectrice de la vie jusque dans l’infiniment petit,

(la rosée matinale dans le jardin d’Arrietty, la pluie dans Le Tombeau des lucioles,

la rencontre du Dieu Cerf dans Princesse Mononoké…)

Ghibli élève la beauté du monde, en 2D par un trait tout en courbes délicieuses,

accentuant la douce mélancolie des héroïnes.

2004 : Le Château ambulant

L'Imaginaire

Enfin, il investi le monde imaginaire comme nul autre.

Le voyage de Chihiro, qui est un des plus beaux films sur l’enfance,

est aussi un magnifique film sur le pouvoir de l’imagination.

L’univers visuel créé pour le film est d’une richesse inégalée,

et m'évite pas les aspects les plus sombres de l'imaginaire,

les parents de Chihiro sont tout de même transformés en cochons !

L’atmosphère y est oppressante, mais Chihiro apaise les peurs

des jeunes spectateurs par sa confiance en l'avenir et son engagement.

Le Studio Ghibli, même dans ses films les plus réalistes,

parvient, dans l’harmonie la plus totale, à mêler réalisme et imaginaire.

Il invente des mondes qui nous appartiennent,

qui ont pris naissance dans nos cerveaux d’enfants,

avec de gentils monstres ronds, des rencontres improbables,

et des amours fantasmés et purs...

Avec Ghibli, les rêves de l’enfance prennent vie.

1988 : Le Tombeau des lucioles

Ghibli a crée un univers merveilleux,

d’une richesse scénaristique et visuelle inégalée

tellement loin des recettes manichéennes de Disney

ou des dessins régressifs en 3D

de Pixar et Dreamworks

où ce sont des animaux

ou des objets qui tiennent les premiers rôles

dans des franchises sans fin...

Ghibli a donné corps à l’imagination de notre enfance

et a capturé l'invisible,

et ce prodige est inestimable.