2020 - Run The Jewels - RTJ4 [24-48]
Déjà le quatrième disque pour Killer Mike et El-P,
les deux quadras ne lâchent plus le mic après s’être trouvé en 2013.
Les raisons du succès de ce duo sont multiples mais reposent
principalement sur les productions ciselées et musclées
d’El-P et les flows extrêmement complémentaires des deux bonhommes.
Moins encombrés par les featurings, les RTJ balancées pour meubler
et les blagues, le groupe impressionne par son sérieux.
Très concentré et sous la barre des 40 minutes, il n’a pas besoin
d’aller trop vite ou trop fort pour réussir ses effets.
En ralentissant la cadence, Killer Mike et El-P sont plus convaincants
et ils signent leurs meilleurs titres à deux.
“goonies vs. E.T.” et ses scratchs old school, les synthés eighties
de “never look back” ou les guitares du Gang of Four reprises
sur “the ground below” sont toutes là pour attester
de la maîtrise des deux rappeurs.
Se laissant la place sur des couplets entiers, rebondissant peu
sur leurs interventions par rapport à leurs habitudes
et lâchant bombe après bombe sans jamais courir après la punchline
mais en les collectionnant.
C’est aussi musicalement leur disque le plus travaillé,
consistant et constant sans trou d’air.
Comme toujours, c’est l’occasion d’inviter les potes
et comme sur le précédent il y a sept invités.
Des surprises comme Josh Homme et Pharrell Williams et
comme d’hab Zack De La Rocha pour que l’on se rappelle
de son existence.
Pharrell et De La Rocha viennent claquer leurs parties
sur les lignes les plus polémiques avec “JU$T” dont le refrain
consiste à entonner :
« Look at all these slave masters posin’ on your dollar. »
Si le groupe a toujours fait passer des messages et a même samplé
un discours de Martin Luther King sur RTJ3, quasiment l’ensemble
des chansons évoquent les violences, les bavures policières ou le racisme.
Autant de sujets qui sont horriblement d’actualité,
au point où sur “walking in the snow“ Killer Mike cite le
“I Can’t Breathe” d’Eric Garner, autre fait divers datant de 2014
similaire à ce qui est arrivé le 25 mai dernier.
Seul ratage de la playlist, la creuse “ooh la la” vite oubliée
car noyée dans la qualité.
Bien en place dans le débat public sans forcer,
parfaitement en équilibre entre beats modernes et clins d’oeils au passé,
le duo sort un disque tendu et qui défile à une vitesse délirante
à tel point que les écoutes défilent.
Concis, à l’essentiel et sacrément bien construit en devenant
de plus en plus sombre, on y voit en quelques écoutes les contours