2024 - IDLES - TANGK [24-48]
Avec ce cinquième disque, Idles poursuit sa mue.
En germe dans le radical Ultra Mono, puis entamée
avec le dernier-né Crawler, cette transformation
fait évoluer le quintet de Bristol d’un punk
sans concession à une grande versatilité stylistique.
Et celle-ci se passe à merveille, sans accroc.
Il faut dire qu’à la production, aux côtés du guitariste
Mark Bowen, il y a du niveau.
Déjà derrière la console pour Crawler, on retrouve
“le nouveau Rick Rubin” alias Kenny Beats.
Un autre 06, plus étonnant, a aussi été appelé :
celui de Nigel Godrich, l’inamovible producteur de Radiohead.
Avec ce trio de producteurs, Tangk serpente entre les matières,
qu’elles soient électroniques et brumeuses, saturées, ouatées
ou battues sans ménagement.
Hormis les sections rythmiques musclées de Hall Of Oates
et de Gift Horse, où Joe Talbot lâche d’ailleurs
un petit “fuck the King”, les guitares électriques deviennent reines,
saturent et lâchent quelques beaux riffs
(Roy, Jungle ou encore Gratitude).
Et si l’on retrouve ci et là la signature d’un Kenny Beats,
grand adepte de la 808 et des batteries explosives,
notamment sur IDEA 01, un délicat morceau d’ouverture
où un piano ruisselle sur un kick mimant les palpitations du cœur,
celle de Goldrich se cristallise à mi-parcours sur A Gospel.
Un sorte de rêverie où l'on voit flou et que les tintements de claviers
font basculer dans le fantastique.
Sur le chemin, d'autres surprises ont été semées, comme James Murphy
et Nancy Whang de LCD Soundsystem (Dancer) ou ce saxophone
qui jaillit de nul part en clôture.
Mais le véritable artisan des nuances s’appelle l’Amour.
Fini les portraits au carré de l'Angleterre, le frontman Joe Talbot écrit
sur ses sentiments et module sa voix.
On la découvre apaisée dès IDEA 01 où il chante tout doux.
Elle scande façon Sleaford Mods sur POP POP POP et
ses textures hybrides à la King Krule ou habille, du bout des lèvres,
les nappes synthétiques du solennel Monolith.
Voilà le disque le plus passionné et passionnant d’Idles